I. LA SENSATION DES COULEURS (4)

Publié le par Philtomb

  7. Orange amère.

 
  L'homme avait perdu connaissance.

 Sa position inconfortable, le manque d'air, ou l'angoisse de ce qui l'attendait, avait fini par avoir raison de lui. Lorsqu'il ouvrit les yeux et essaya de bouger, sa première impression fut celle d'une douleur intolérable dans tous ses membres, qui étaient complètement engourdis. Des millions d'aiguilles, lui sembla-t-il, lui entraient dans les bras et les jambes. Il serra les dents pour ne pas pousser un gémissement.

  - Se sent-il mieux ? prononça une voix rude mais claire.

  - Il se sentirait mieux si vous le détachiez, répliqua l'homme, à qui l'usage de la mémoire et de la langue revenait plus vite que celui du corps.

  - Il n'est plus attaché, reprit la voix. Il est parfaitement libre de ses mouvements.

  - Où est-il, alors ?

  - Sur une couchette, à l'infirmerie de l'aéroport présidentiel White. Le pilote de l'avion aurait dû le libérer plus tôt. Il est en prison.

  - Qui ? Moi ?

  - Non, le pilote. C'était une faute de service impardonnable.

 - Vous êtes bien gentil de vous inquiéter à ce point de mon confort, mais enfin ce n'était pas une raison pour boucler le pilote ...

  - Il ne s'agit pas de confort. Sa vie est précieuse à notre pays.

  - La vie du pilote ?

 - Non, la sienne. Excusez-moi, mais, s'il est remis, je vais avoir l'honneur de l'accompagnez au cube présidentiel.

  L'homme n'avait plus que quelques milliers d'aiguilles dans les doigts et les orteils. Il secoua énergiquement la tête pour remettre ses idées bien en place : White, le gouvernement, une dictature efficace, nouvelle et impitoyable, puis sa fuite ... ratée à l'évidence. Un choc : son geste de la tête, mal interprété ...

  Il aurait été impossible à quiconque de voir le corps embarqué dans une puissante voiture noire qui attendait, le moteur tournant. Le passager transféré de l'infirmerie à la voiture n'eut qu'une sensation : une odeur étrange d'orange flottant dans l'air. Puis les portes claquèrent et le véhicule s'élança.



  8. Encyclopédie des couleurs.

 
  ART GREC :
les anciens grecs ne s'attachaient pas, comme nous, aux nuances chromatiques, mais à la qualité de la lumière, à son rayonnement, à son intensité et à sa netteté. Ils classaient les cent cinquante termes de couleurs de leur vocabulaire en deux catégories : les teintes brillantes, vives, vivantes, et les teintes mates, sombres ou mortes.    Un adjectif comme xanthos, par exemple, que nous traduisons paresseusement par "blond", se trouve appliqué aux réalités les plus différentes et qui nous paraissent tantôt dorées, tantôt rouges et même vertes. Le mot se traduirait bien mieux par "clair" ou "lumineux".

  La pourpre pouvait être violette, rouge, verte ou jaune : on n'en appréciait, au cinquième siècle avant notre ère, que l'éclat, la luminescence. Athéna glaukôpis n'avait donc pas des yeux "glauques", ni "pers" - une couleur intermédiaire entre le bleu et le vert - ni "de chouette", à l'image de l'animal personnalisant sa réflexion et sa ruse, mais brillants et étincelants.

  Ajoutons enfin que, pour les grecs de l'époque classique, les conventions de l'Art faisait du rouge en teinture le symbole de la vie, et du bleu le symbole de la terre ou des objets inanimés.




Le Parthénon et ses couleurs reconstituées virtuellement.

Sources :
http://arts.ens-lsh.fr/peintureancienne/index.htm et Iowa State Univ. VRAC.

Extrait de La vie en couleurs par Arthur RAINBOW.

 

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